Depuis janvier 2024, la France s’oppose fermement au volet commercial de l’accord de libre-échange signé en 2019 entre le Mercosur et l’Union européenne. Ce refus repose sur des préoccupations économiques, sanitaires et environnementales, notamment en ce qui concerne la concurrence agricole et la protection de l’Amazonie.
Le Mercosur : un marché commun en Amérique du Sud
Le Mercosur (Marché Commun du Sud, ou Mercado Común del Sur en espagnol) est un bloc économique et politique créé en 1991 par l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. Son objectif principal est de favoriser l’intégration régionale à travers une union douanière et la libre circulation des biens, des services et des capitaux entre ses membres.
Évolution et élargissement du Mercosur
Au fil des années, le Mercosur s’est élargi :
- Le Venezuela a rejoint le bloc en 2012, mais son adhésion a été suspendue en 2016 en raison de la crise politique du pays.
- D’autres pays, comme le Chili, la Bolivie et le Pérou, entretiennent des relations économiques étroites avec le Mercosur et ont exprimé leur intérêt à renforcer leur coopération avec l’organisation.
Les objectifs du Mercosur
Le Mercosur vise plusieurs objectifs stratégiques :
✔ Intégration économique : suppression des barrières douanières et harmonisation des politiques commerciales.
✔ Développement social : réduction des inégalités et promotion d’une croissance durable.
✔ Coopération politique : renforcement des liens diplomatiques et institutionnels entre les États membres.
✔ Négociations commerciales : représentation du bloc dans les accords internationaux, notamment avec des partenaires comme l’Union européenne.
Un accord de libre-échange controversé avec l’Union européenne
Après plus de 20 ans de négociations, l’Union européenne et le Mercosur ont signé en juin 2019 un accord de libre-échange, intégré dans un accord d’association plus large. Ce texte vise à :
🔹 Renforcer les relations commerciales en réduisant les droits de douane et les obstacles non tarifaires.
🔹 Favoriser la coopération et le dialogue sur des enjeux tels que l’économie numérique, la recherche, l’éducation, la protection de l’environnement et la lutte contre la cybercriminalité.
Si les volets « dialogue politique » et « coopération » ne soulèvent pas de difficultés majeures, le chapitre commercial suscite, en revanche, une vive opposition.
Pourquoi la France s’oppose-t-elle à cet accord ?
Depuis janvier 2024, face à la pression des agriculteurs et des préoccupations environnementales, la France a réaffirmé son opposition à la ratification de l’accord.
Les principales critiques portent sur :
❌ Une concurrence jugée déloyale pour l’agriculture européenne :
- Les pays du Mercosur bénéficieraient d’un accès élargi au marché européen pour leurs produits agricoles et alimentaires, au détriment des producteurs français et européens.
- Les normes sanitaires et environnementales sont moins strictes qu’en Europe : les limites maximales de résidus (LMR) autorisées au Brésil sont souvent plus élevées que celles imposées par l’UE.
- L’élevage dans le Mercosur ne respecte pas les mêmes standards qu’en Europe (alimentation des animaux, bien-être animal, usage des pesticides).
❌ Un risque environnemental accru :
- L’accord pourrait accentuer la déforestation en Amazonie, en incitant à une intensification de la production agricole (notamment de soja et de viande bovine destinés à l’exportation).
Une ratification toujours incertaine
Si certains pays européens soutiennent l’accord, il ne pourra entrer en vigueur qu’après ratification par les 27 États membres de l’UE, ce qui alimente de vives tensions.
Face aux réticences, des négociations ont repris en septembre et octobre 2024, avec plusieurs déplacements de négociateurs européens au Brésil. Une nouvelle rencontre est prévue fin novembre 2024, mais la signature symbolique du traité lors du sommet du G20 au Brésil (18-19 novembre 2024) semble désormais peu probable.
Le Mercosur représente un acteur économique majeur en Amérique du Sud, cherchant à renforcer ses liens commerciaux avec l’Europe. Cependant, l’accord de libre-échange avec l’UE se heurte à une forte opposition, notamment de la France, en raison des risques économiques, sanitaires et environnementaux qu’il engendre. Son avenir reste donc incertain, suspendu aux négociations entre Bruxelles et les États membres.