Les transferts d’argent envoyés par les membres de la diaspora représentent aujourd’hui une ressource financière majeure pour de nombreux pays africains. En 2025, cette « économie de la diaspora » continue de croître, suscitant de plus en plus d’intérêt de la part des gouvernements, des institutions financières et des acteurs du développement. Mais cette manne est-elle réellement un levier durable pour les économies locales ? Analyse.
Des montants qui rivalisent avec l’aide publique au développement
Selon les dernières estimations de la Banque mondiale, les transferts de fonds vers l’Afrique subsaharienne ont atteint 56 milliards de dollars en 2024, en légère hausse par rapport à l’année précédente. Dans certains pays, comme le Nigéria, le Sénégal, le Togo ou les Comores, ces envois d’argent représentent une part significative du PIB, parfois plus de 10 %.
Contrairement à l’aide publique au développement ou aux investissements étrangers, ces transferts sont directs, réguliers et relativement stables, même en période de crise. Ils servent souvent à couvrir des besoins essentiels : logement, santé, scolarité, alimentation, ou encore petits investissements familiaux.
Un soutien vital pour les ménages
Les envois de la diaspora jouent un rôle crucial dans la réduction de la pauvreté, notamment dans les zones rurales où l’accès aux services financiers formels reste limité. Ils permettent de lisser les revenus, d’absorber les chocs économiques et de financer l’ascension sociale de nombreux bénéficiaires.
Dans des pays comme le Mali, la Guinée ou le Burkina Faso, les transferts de fonds sont également utilisés pour financer des projets communautaires, tels que la construction d’écoles, de dispensaires ou de forages d’eau. La diaspora devient ainsi un acteur de développement local à part entière.
Des limites à ne pas négliger
Malgré leur importance, les transferts de fonds n’ont pas toujours un impact structurant sur l’économie nationale. Utilisés principalement pour la consommation courante, ils peinent souvent à se transformer en investissements productifs à long terme.
De plus, les coûts de transfert restent élevés dans certaines régions, notamment en Afrique centrale, où les commissions atteignent encore 8 à 10 % du montant envoyé. Cela réduit la somme effectivement perçue par les familles.
Enfin, cette dépendance croissante à l’argent de la diaspora peut masquer l’inefficacité des politiques publiques ou freiner la mobilisation de ressources internes.
Vers une meilleure valorisation de la diaspora
Conscients du potentiel de cette ressource, plusieurs pays africains mettent en place des politiques incitatives pour canaliser les transferts de fonds vers des projets d’investissement local. Des banques créent des produits financiers dédiés aux diasporas (comptes d’épargne, emprunts obligataires, fonds d’investissement), et certaines capitales africaines organisent désormais des forums économiques de la diaspora.
Par ailleurs, la digitalisation des transferts via le mobile money et les fintechs réduit progressivement les coûts et accroît la transparence des flux.
Une manne à structurer
Les transferts de fonds ne sont ni une solution miracle, ni une simple aide informelle. Ils constituent un outil puissant mais encore sous-exploité pour le développement local.
À condition d’être mieux canalisés, accompagnés et articulés aux politiques publiques, ils peuvent devenir un levier durable pour renforcer la résilience économique et sociale des pays africains.