À peine nommé, le gouvernement Barnier se trouve déjà confronté à un défi de taille : rééquilibrer les comptes publics sans alourdir la pression fiscale sur les ménages et les classes moyennes. L’objectif affiché est ambitieux : réaliser 30 milliards d’euros d’économies tout en préservant la compétitivité économique.
Antoine Armand, le nouveau ministre de l’Économie, a présenté plusieurs pistes de réforme. Parmi elles, une fiscalité plus ciblée sur les grandes entreprises et une révision des exonérations de charges sociales patronales. Cet article explore les leviers envisagés pour atteindre cet équilibre délicat.
Les grandes entreprises dans le viseur
Dimanche dernier, le Premier ministre a laissé entendre que des contributions fiscales spécifiques pourraient être imposées aux grandes entreprises et aux ménages les plus aisés. Tout en excluant une augmentation généralisée des impôts, il a insisté sur la nécessité de préserver les foyers déjà lourdement taxés.
Parmi les options étudiées figure une surtaxe exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés, qui ne concernerait que les plus grandes entreprises. Cette mesure marquerait un tournant, car la tendance des dernières années était plutôt à la baisse progressive du taux d’imposition des sociétés (passé de 33,3 % en 2017 à 25 % en 2022) pour stimuler l’investissement et l’emploi.
Toutefois, l’idée d’une contribution temporaire gagne du terrain au sein de l’exécutif. Les contours exacts de cette mesure restent à définir, et des discussions avec les représentants du monde économique sont prévues avant toute décision définitive.
Repenser les exonérations de charges sociales
Autre levier envisagé : la réduction des exonérations de charges patronales, qui permettent aux employeurs de diminuer leurs cotisations pour les salaires les plus bas. Actuellement, ces dispositifs visent à favoriser l’emploi, notamment en exonérant de charges les rémunérations au niveau du Smic.
Toutefois, ces allègements sont de plus en plus critiqués. Certains estiment qu’ils freinent la progression salariale, car une augmentation de salaire entraîne une diminution des exonérations pour l’employeur, ce qui le dissuaderait de mieux rémunérer ses salariés.
Vers une réorientation des exonérations
Le rapport Bozio-Wasmer propose une approche plus ciblée en s’inspirant du modèle suédois. L’idée serait d’accorder des exonérations renforcées aux jeunes travailleurs de moins de 26 ans afin de faciliter leur insertion professionnelle. Cette réforme viserait à répondre à un enjeu crucial : l’intégration des jeunes sur le marché du travail.
Plus largement, le gouvernement envisage de réorienter les allègements de charges vers les salaires modestes et intermédiaires, tout en réduisant les avantages fiscaux pour les hauts revenus. Cette stratégie permettrait :
- D’encourager les employeurs à proposer des rémunérations plus attractives.
- De limiter le phénomène de « smicardisation », où de nombreux salariés restent bloqués à des salaires proches du Smic.
- D’augmenter les recettes de l’État sans nuire à la compétitivité des entreprises.
Le ministère de l’Économie estime que ces ajustements pourraient générer environ 4 milliards d’euros par an, contribuant ainsi à réduire le déficit public tout en stimulant l’emploi.
Un équilibre difficile à trouver
Michel Barnier et son gouvernement doivent maintenant arbitrer entre nécessité budgétaire et impératifs économiques. Si ces mesures permettent d’alléger le poids de la dette publique, elles ne sont pas sans risques. Une surtaxe sur les entreprises pourrait freiner l’investissement, tandis qu’une réduction des exonérations pourrait pénaliser l’emploi dans certains secteurs.
L’exécutif doit donc avancer avec prudence, en concertation avec les acteurs économiques et sociaux, afin de trouver un compromis viable entre rigueur budgétaire et soutien à la croissance.