Malgré un contexte politique et budgétaire particulièrement instable, l’emploi dans la French Tech a su faire preuve de résilience en 2024. Avec plus de 18.000 emplois créés, soit une hausse de 5,8 % par rapport à 2023, le secteur du numérique en France continue de croître, bien que de manière plus modérée qu’au cours des années précédentes. Comment expliquer cette résistance face aux turbulences économiques et politiques ? Quels sont les secteurs qui tirent leur épingle du jeu ? Décryptage d’un écosystème en mutation.
Un ralentissement marqué par des incertitudes politiques
L’année 2024 a été marquée par un climat politique tendu en France. La dissolution surprise du Parlement et les retards dans le vote du budget 2025 ont contribué à un climat d’incertitude qui s’est directement répercuté sur l’emploi dans les start-up.
Pendant l’été, notamment en août et septembre, les recrutements ont connu un net ralentissement. Face à ce contexte instable, de nombreuses jeunes pousses ont adopté une attitude plus prudente. Selon les données du baromètre annuel de Numeum/Motherbase, un quart des start-up ont maintenu leur effectif inchangé, tandis que 40 % d’entre elles ont tout de même créé au moins un poste.
Si le dernier trimestre de 2024 a montré des signes de reprise, celle-ci reste timide par rapport aux années précédentes, notamment en comparaison avec 2021 (+13,3 % d’emplois créés) et 2023 (+9 %).
Des financements en baisse, mais une croissance maîtrisée
Outre les tensions politiques, le financement des start-up françaises a également reculé en 2024. Le baromètre du cabinet EY révèle que les levées de fonds ont atteint 7,7 milliards d’euros, contre 8,32 milliards en 2023, soit une baisse de 7 %. Cette contraction a obligé de nombreuses entreprises à revoir leur stratégie de croissance et à privilégier une expansion plus raisonnée.
Dans ce contexte, les start-up ont donc été plus sélectives dans leurs recrutements, préférant consolider leurs équipes existantes plutôt que d’embaucher massivement. Ce phénomène s’inscrit dans une tendance plus large observée dans le secteur de la tech mondiale, où l’euphorie post-COVID laisse place à une gestion plus prudente des ressources.
Les secteurs qui recrutent : la greentech et l’IA en tête
Malgré ces défis, certains secteurs ont continué d’enregistrer une forte dynamique de recrutement. Parmi eux, la greentech se démarque particulièrement avec plus de 4.000 emplois créés en 2024. Ce secteur bénéficie de l’essor des technologies liées à la transition énergétique, notamment dans le domaine des batteries électriques. Un exemple emblématique est la licorne Verkor, qui multiplie les embauches à Dunkerque, où elle construit une gigafactory destinée à produire des batteries pour véhicules électriques.
L’intelligence artificielle (IA) se positionne également comme un moteur de l’emploi dans la French Tech. Avec 1.900 start-up spécialisées dans ce domaine, la demande en talents ne cesse de croître.
Porté par les investissements massifs et le développement rapide des technologies d’IA générative et d’automatisation, ce secteur représente le deuxième plus grand pourvoyeur d’emplois en 2024.
Des disparités régionales toujours marquées
Bien que la dynamique de création d’emplois soit globalement positive, des disparités régionales persistent. L’Île-de-France reste le principal bassin d’emploi tech avec 10.000 créations de postes, soit 56 % du total national. Toutefois, cette domination tend à s’atténuer, puisque cette part a reculé de 10 points par rapport à 2022, traduisant un certain rééquilibrage territorial.
D’autres régions émergent comme pôles dynamiques pour la tech, notamment :
- Auvergne-Rhône-Alpes, avec 1.987 emplois créés, où l’industrie et l’innovation technologique se développent rapidement.
- Nouvelle-Aquitaine, qui a enregistré 1.328 nouvelles embauches, notamment grâce aux start-up industrielles ayant des besoins importants en foncier.
Ces évolutions montrent que l’implantation des start-up tend à se diversifier en dehors de Paris, favorisant un développement plus homogène de l’écosystème tech en France.
Perspectives pour 2025 : un optimisme prudent
Si 2024 a été une année marquée par la prudence, les perspectives pour 2025 restent prometteuses. Plusieurs éléments pourraient favoriser un rebond des recrutements :
- Une stabilisation politique qui redonnerait de la visibilité aux entrepreneurs.
- Une reprise progressive des financements, avec un regain d’intérêt des investisseurs pour certaines niches technologiques comme l’IA ou les énergies renouvelables.
- Des initiatives gouvernementales visant à renforcer l’attractivité du secteur numérique et à accompagner les start-up dans leur développement.
Toutefois, la prudence reste de mise, car les tensions économiques et géopolitiques mondiales pourraient continuer d’affecter la dynamique du marché.
Malgré un environnement politique et financier incertain, l’emploi dans la French Tech a su résister en 2024, avec 18.000 créations de postes. Si la croissance est moins fulgurante que par le passé, elle reste soutenue par des secteurs clés comme la greentech et l’intelligence artificielle.
Les disparités régionales se réduisent progressivement, mais l’Île-de-France demeure le principal pôle d’emplois. Pour 2025, les acteurs de la tech devront s’adapter aux évolutions économiques et politiques pour continuer d’innover et de créer des emplois.