À moins de deux semaines des élections régionales en Thuringe et en Saxe, la question de l’immigration illégale domine le débat politique en Allemagne. Le gouvernement du chancelier Olaf Scholz a accéléré le rythme des décisions, adoptant des mesures drastiques pour répondre à une préoccupation croissante des Allemands : selon un sondage récent de Deutschlandtrend, 48 % des citoyens estiment que l’immigration est le sujet politique le plus important, surpassant l’économie, le climat et les inégalités sociales.
Un virage politique marqué
Longtemps caractérisé par des négociations interminables entre les trois partis de la coalition, le gouvernement Scholz a changé de cap face à l’urgence. Quelques jours après l’attaque au couteau survenue à Solingen, le gouvernement a annoncé des mesures fermes : renforcement des lois sur le port d’armes, suppression des aides pour les demandeurs d’asile ayant transité par un autre pays de l’UE, et même une expulsion de 28 Afghans condamnés pour crimes, une première depuis le retour des talibans au pouvoir.
Un contrôle renforcé aux frontières
La ministre de l’Intérieur, Nancy Faeser, a également décidé de généraliser les contrôles aux frontières avec plusieurs pays voisins, dont la France, le Luxembourg et les Pays-Bas. Ces mesures, qui s’ajoutent à celles déjà en place avec la Pologne, la République tchèque et l’Autriche, visent à freiner l’afflux de migrants illégaux. Depuis octobre 2023, environ 30 000 réfugiés ont été renvoyés. Toutefois, ces annonces suscitent des doutes quant à leur mise en œuvre, notamment en raison de la surcharge des forces de police.
Des divergences au sein des partis
Malgré ces initiatives, le consensus politique demeure fragile. Une réunion récente entre le gouvernement fédéral, les Länder et l’opposition n’a débouché sur aucun accord. La CDU a annoncé son retrait des discussions, tandis que le gouvernement a créé une « Task Force Dublin » pour accélérer le renvoi des demandeurs d’asile enregistrés dans d’autres pays de l’UE. Nancy Faeser a proposé des mesures de rétention plus strictes pour éviter que ces personnes ne disparaissent dans la nature.
Une opinion publique en quête de changement
Le climat politique est exacerbé par une tentative récente d’attentat islamiste et la montée des inquiétudes sécuritaires. Selon le même sondage, 77 % des Allemands souhaitent un durcissement de la politique d’asile, estimant que trop de personnes viennent en Allemagne. Les dirigeants politiques marchent sur un fil : ils doivent répondre à ces attentes tout en préservant les principes fondamentaux de la libre circulation en Europe et l’image d’une Allemagne accueillante.
Un défi politique et logistique
La mise en œuvre des contrôles et des expulsions soulève des défis logistiques et juridiques. Les syndicats de police expriment leurs réserves, tandis que des partenaires européens, comme l’Autriche, refusent de coopérer pour reprendre des migrants renvoyés. De plus, la réglementation européenne limite ces contrôles à deux ans au maximum.
Dans ce contexte tendu, la gestion de l’immigration illégale devient un test majeur pour la coalition d’Olaf Scholz. Les élections régionales à venir pourraient bien servir de baromètre pour mesurer l’approbation publique face à ces politiques. Mais pour maintenir un équilibre entre fermeté et humanité, une grande habileté politique sera nécessaire.