Lundi, des agriculteurs affiliés à la Coordination rurale (CR) ont tenté de se rassembler à Paris à bord de tracteurs et de voitures. Leur mobilisation, pourtant freinée par les forces de l’ordre, s’inscrit dans un contexte de revendications multiples à la veille des élections professionnelles des chambres d’agriculture.
Des rassemblements éparpillés et contrôlés
Dans la capitale, quelques dizaines d’agriculteurs venus principalement de la Marne et de l’Aube ont essayé de se regrouper au Trocadéro pour rejoindre l’Arc de Triomphe. Mais les forces de l’ordre ont bloqué leur progression. À proximité de Matignon, sept autres agriculteurs, accompagnés d’une chèvre, ont été écartés sans incident.
Selon Christian Convers, secrétaire général de la CR, les autorités n’ont jamais accepté de leur fournir un lieu de rassemblement, malgré l’assurance que les manifestants n’avaient aucune intention de bloquer la capitale.
En région, des actions similaires ont été menées. Dans les Yvelines, une dizaine de tracteurs et une quinzaine de voitures ont forcé un barrage pour s’engager sur la N10 avant d’être bloqués aux Essarts-le-Roi. Dans l’Essonne, six tracteurs ayant franchi un barrage ont été interceptés. Une tension palpable a également été observée à Artenay (Loiret), où des agriculteurs accompagnés de 21 tracteurs ont été autorisés à se regrouper à proximité d’une sucrerie Téréos. En Seine-et-Marne, deux petits convois ont été contenus, tandis que dans le Rhône, une trentaine de tracteurs ont été repérés en direction de l’autoroute A7.
Des revendications claires face aux enjeux agricoles
Les agriculteurs protestent notamment contre les accords de libre-échange, les contrôles imposés dans les exploitations et la concurrence jugée déloyale, y compris au sein de l’Union européenne. Christian Convers, déplorant l’impossibilité de manifester librement, a souligné que leur objectif était d’obtenir une rencontre avec le Premier ministre ou des parlementaires.
« Aujourd’hui, c’est un coup d’avertissement. Nous sommes capables d’aller où nous voulons », a déclaré Christophe Sichnknecht, président de la CR de l’Aube, en insistant sur l’urgence de la situation. Frédéric Bourbonneux, un agriculteur de l’Aube, a expliqué que les pertes de rendement, l’augmentation des charges fiscales et la baisse des prix des céréales rendaient leur activité insoutenable.
Les manifestants critiquent également l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur, craignant des conséquences néfastes pour l’agriculture française. Sur ce point, le président Emmanuel Macron a affirmé lundi que « la messe n’était pas dite » et que la France continuerait à défendre ses engagements avec force.
Une mobilisation sous contrainte
La préfecture de police de Paris avait interdit les rassemblements non déclarés de dimanche 18h00 à lundi 12h00 dans un large périmètre du centre de Paris. Une interdiction similaire était en vigueur autour du marché de Rungis et sur l’autoroute A6.
Face à ces restrictions, la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a déclaré comprendre l’inquiétude des agriculteurs, mais a prévenu qu’il était hors de question de permettre un blocage de Paris, notamment un jour de rentrée scolaire. Elle a rappelé que le Premier ministre François Bayrou recevrait les syndicats agricoles lundi prochain, estimant que l’urgence invoquée par les manifestants était exagérée.
Une échéance déterminante
Cette mobilisation intervient à l’approche des élections professionnelles des chambres d’agriculture, prévues du 15 au 31 janvier. La Coordination rurale, qui s’est imposée comme une force montante grâce à des actions coups de poing, espère réduire l’hégémonie de l’alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs et remporter une quinzaine de chambres.
Cette mobilisation des agriculteurs, bien qu’encadrée, traduit un malaise profond au sein du secteur agricole français. Les prochains jours pourraient être décisifs pour l’avenir de leurs revendications et leur impact sur les élections à venir.