De 20 milliards d’euros de déficit à 3 milliards d’excédent : le redressement

Alors que la France fait face à un déficit public préoccupant, dépassant potentiellement 6 % du PIB et une dette s’établissant à 112 % du PIB, un autre pays européen est parvenu à renverser une situation similaire. Le Portugal, touché de plein fouet par la crise économique de 2008, s’est vu contraint d’adopter des mesures drastiques pour éviter la faillite. Aujourd’hui, il affiche un excédent de 3 milliards d’euros. Comment ce pays a-t-il réussi à redresser son économie et à attirer de nouveaux investissements ?

Les premières années de la crise : l’urgence d’une austérité budgétaire

En 2008, le Portugal est plongé dans une profonde crise économique, avec un déficit de 20 milliards d’euros et une dette atteignant 130 % du PIB. Le gouvernement socialiste de José Sócrates sollicite alors l’aide du FMI et de l’Union européenne pour éviter la banqueroute, obtenant un prêt de 78 milliards d’euros. Cependant, l’austérité budgétaire, bien que cruciale, est rejetée par le Parlement, poussant José Sócrates à la démission.

Le gouvernement suivant, mené par Pedro Passos Coelho, instaure alors une série de mesures d’austérité sévères : réduction des salaires, augmentation des taxes comme la TVA à 23 %, réduction des aides sociales, et réforme des retraites. Ces mesures, certes impopulaires, permettent de réduire le déficit et de stabiliser les finances publiques. En parallèle, des initiatives sont mises en place pour attirer les investissements étrangers, comme le « visa doré » et des exonérations fiscales pour les retraités étrangers.

Un tournant économique sous le mandat d’Antonio Costa

Sous l’impulsion du Premier ministre Antonio Costa (2015-2024), le Portugal opère un virage économique significatif. Le gouvernement socialiste privilégie une politique plus équilibrée, allégeant certaines restrictions sans compromettre la rigueur budgétaire. La croissance économique s’accélère, soutenue par le tourisme et une main-d’œuvre qualifiée et abordable.

L’impact de cette politique est concret : en 2024, le Portugal enregistre un excédent budgétaire de 1,2 % et la dette publique se stabilise autour de 100 % du PIB. Le chômage chute à 6,1 %, contre 16,5 % en 2013. Grâce aux visas dorés, le pays accueille près de 12 000 nouveaux investisseurs, apportant 6,7 milliards d’euros d’investissements depuis 2012.

Le succès économique : des retombées inégales

Le secteur du tourisme, devenu pilier de l’économie portugaise, génère plus de 25 milliards d’euros de recettes annuelles, attirant chaque année plus de 30 millions de visiteurs. Cependant, cette réussite économique cache une réalité plus sombre : un quart de la population portugaise vit toujours avec le salaire minimum (820 euros par mois) et le coût de la vie, notamment à Lisbonne, ne cesse de grimper.

Les tensions sociales s’intensifient, alimentées par une inflation des loyers (+50 % entre 2021 et 2022) et des salaires qui peinent à suivre. Les grèves dans la fonction publique se multiplient, et le gouvernement est contraint de revoir les salaires à la hausse.

Un modèle inspirant pour la France ?

Le cas du Portugal montre qu’un redressement économique rapide est possible grâce à une politique d’austérité rigoureuse suivie d’une diversification économique judicieuse. Toutefois, cette transformation doit être accompagnée de mesures pour garantir un partage plus équitable des bénéfices économiques.

En France, où la dette et le déficit sont des sujets de préoccupation croissante, le modèle portugais pourrait offrir des pistes de réflexion.